dimanche 10 mai 2009

Tatooine, Tataouine

Georges Lucas a offert aux gens de ma génération l'occasion d'avoir leur main dans la main de leur père pour aller au cinéma voir "La Guerre des étoiles".
Ce cinéma vous le connaissez c'est celui d'Elbeuf, belle boîte de verre et de fer de Marcel Lods.
Le génie de Lucas fut son équipe et son sens de l'économie.
Un exemple remarquable pour ce qui concerne ce blog c'est la manière dont il a su mêler les influences, faire de lieux étrangers des lieux étranges.
On dit qu'à la recherche de décors pour la planète désertique sur laquelle Luke Skywalker fut élevé par son oncle, il aurait beaucoup aimé Matmata (Matmatha). Cette ville enterrée, faite de trous troglodytes habités, devient la ferme ou Luke jeune homme rêve de rejoindre la Rébellion. Le soir, les deux soleils se couchent sur l'horizon lointain.
En Tunisie, un seul soleil, très chaud et donc des gens qui vivent pour s'en protéger dans des trous aménagés. C'est une idée remarquable d'économie. Lucas en acceptant de filmer ici retourne l'idée du décor, Il ne construit pas ou peu mais aménage des trous d'autochtones ! Summum de l'étrangeté, j'entends pour nous enfants occidentaux, il suffira de quelques bouts de cartons et l'affaire est jouée. Une tempête de sable emportera le tout.
D'ailleurs il faudrait aller voir ces lieux. Ils doivent être nombreux les fans qui se rendent là-bas. Mais j'aimerais en savoir plus sur la manière dont on vit dans ce genre de lieu. Le toit c'est la rue, la place, et là ça nous rappelle quelqu'un... Mais je ne vois pas de pentes ici pour descendre dans les maisons mais des escaliers. Les cours sont donc à la fois très intimes et totalement ouvertes. J'imagine qu'il doit y avoir dans les familles des histoires drôles et des commérages générés par cette situation. Cela forme une ville bien loin de nos habitudes. De notre point de vue, homme debout sur le sol cette ville n'existe pas ! C'est un peu comme dans le métro soudain vous prenez conscience que vous êtes dans un tube, qu'il y en a un au-dessus et un en dessous avec des gens comme vous qui attendent. Voir le très beau film" les Gaspards" de Pierre Tchernia dans lequel des parisiens pour échapper à la vie moderne et frénétique décident d'investir les métros, galeries de carrières abandonnées et catacombes. Il me faudra le revoir.
On dit aussi que Georges Lucas à la recherche d'un nom pour cette planète se rappela du nom de Tataouine à proximité. Avec la fatigue, la chaleur et l'accent américain cela devint Tatooine...
Je me souviens de mon effarement lorsque j'appris que ce lieu existait réellement. A la fois l'envie d'y aller et une forme de déception, le génie n'avait pas tout inventé. Mais on peut aussi dire que c'est là son vrai génie.
Quand Marcel Lods, Pierre Tchernia et Georges Lucas se rencontrent, je crois que c'est autour de cartes postales !
Voici donc deux cartes postales de Matmata orthographiée ainsi au verso, il s'agit d'éditions Chaman à Tunis. Pas de date, donc difficile de savoir si Georges Lucas a pu en expédier de telles à sa famille !


Et quelques images du tournage et du film. Admirons la plongée du micro du perchiste !

Regardez comment avec une sculpture étrange servant à la culture "hydroponique" (sic) on fait d'un lieu réel une entité imaginaire...

l'équipe de tournage en pique-nique.

Luke Skywalker essaie de convaincre son oncle qu'il doit partir pour rejoindre la Rébellion. Est-il encore possible de se procurer la merveilleuse vaisselle blanche ?




les petites choses




Si on devait mesurer la popularité d'une architecture ou d'une manifestation par le nombre de cartes postales que l'on déniche dans les boîtes à chaussures, cagettes et boîtes à galettes bretonnes on pourrait facilement décerner un prix d'honneur à l'Expo 58 à Bruxelles.
Voici un nouvel exemple, peut-être un peu moins courru car sortant de la série officielle de l'exposition. Il s'agit du beau petit pavillon, place de Brouckère, un pavillon d'information. On le doit aux architectes messieurs Baucher, Blondel et Filippone.
La carte postale est une Bromophoto expédiée en 1963.
J'aime, vous le savez, ces toits ainsi constitués, les paraboloïdes hyperboliques... C'est comme à Royan mais tendu dans l'autre sens.
Puisqu'on évoque Royan, nous sommes tout près de La Palmyre et des Mathes. Voyez cette Chapelle Notre-Dame des Pins.

Voyez sa simplicité de cabane de boys-scouts. Voyez l'énorme autel en pierre et la nature tout autour et les petits sièges au premier plan. C'est étrange mais cela me touche. Bien sûr c'est le ciel et l'air de Royan mais cet édicule est d'une candeur désarmante et d'une vérité œcuménique au fond très chrétienne.
Un signe, un lieu défini par lui, des matériaux pris sur place, un espace qui prend sa fonction et je crois que nous sommes là finalement devant quelque chose qui nous parle des premiers temps du Christianisme. Oui touché.
Je le suis aussi par la pause du curé et des enfants de chœur un peu au loin, un peu timides, regardant le photographe. Ils nous laissent l'espace, nous attendent et je ferais bien là une pause.
La carte postale est une édition Artaud en Mexichrome.
Je ne trouve rien sur cette construction. Si dans nos lecteurs spécialisés en Art Sacré du Vingtième siècle, quelqu'un se souvient de ce moment gracieux qu'il nous informe vite ! sait-on jamais, derrière cette pyramide de rondins se cache peut-être un architecte, un sculpteur ayant offert là aux fidèles une bien jolie chapelle. Comme cela contraste avec Monsieur Gillet à Royan et Notre-Dame.
Monsieur Gillet repose sous sa voûte de béton pré-contraint. Quel heureux homme ! Mais finalement si j'avais à choisir, j'opterais bien moi pour ce morceau de terre sous le ciel de la Charente Maritime, je vous rassure le plus tard possible ... Il me faudra alors me faire baptiser.
Je pourrais le faire là :

Sanctuaire de Notre Dame de Rocciamelone par Emanuele Godone en 1959. J'arriverais avec ma décapotable italienne et le gravier gris croustillerait sous les pneus. Le curé me mettrait un peu d'eau bénite et fraîche sur la tête et je repartirais dans l'air tiède, les cheveux mouillés séchant grâce au vent violent dû à ma vitesse...
Oui bon là il faut que je me calme.
La carte postale est une édition Sacat en Fotocolor et la Riproduzione vietata ! Et celle-ci est volée sur internet, désolé vraiment désolé je suis.